Tout tourne autour de trois mètres manquant à la fameuse tapisserie de Bayeux, véritable roman fleuve sur toile de lin et petits points de broderie. On connaît tous cette œuvre d'art et d'Histoire, ce véritable roman fleuve contant la conquête de l'Angleterre par Telle le Conquest.

Mais quel lien peut-il y avoir avec Napoléon, Dominique Vivant Denon, agent de la communication de l'Empereur, le famille Windsor avec des brodeurs de l'Égypte Copte, les amours de Lady Diana et de Dodi A-Fayed (Faut bien une petite touche people, de nos jours, cela fait bien), l'ordre du général von Choltitz en vue d'expédier la tapisserie vers Berlin au moment de la Libération de Paris en août 1944 ? Pourquoi a-t-on tenté d'assassiner Solange Fulgence, la directrice du musée de la Tapisserie à Bayeux. C'est ce que tente de découvrir Pénélope Breuil, jeune et brillante conservatrice tout juste sortie de l'école du Louvre et nommée pour son premier poste auprès de Solange Fulgence. Elle est aidée dans son enquête par son ami et amant Wandrille. Ce jeune dandy dilettante, chroniqueur d'actualité télévisuel manie aussi bien la chronique TV pour un journal que l'aiguille le tambour à broder. Ils vont trouver soutien auprès de Pierre Erard, journaliste à La Renaissance, qui connaît Bayeux et ses environs comme le fond de sa poche. Le meurtre atroce d'un membre du club "des fils de 1066" et les beaux yeux de Pénélope l'incitent à s'engager dans l'affaire.

On trouvera peu de narration dans cette intrigue brodée par A. Goetz en un style qui se veut dynamique, plein d'humour et enlevé. Pourtant le résultat donne l'impression que les personnages parlent beaucoup mais ne tiennent pas de réelle conversation avec leur interlocuteur. C'est assez étrange. Tout le monde joue son rôle, donne sa réplique mais cela manque à mon sens de liant. C'est surtout l'occasion pour l'auteur de placer toutes les références littéraires, artistiques et autres.
Je suis sortie de cette histoire truffée d'éléments historiques appartenant à des époques différentes assez abasourdie, comme saturée par un mets trop riche en saveurs variées. Au final, l'alchimie n'opère pas. Je désespérais presque que Pénélope arrive un jour à trouver la solution.
Même si on ne peut décemment pas reprocher à l'auteur son érudition, sa connaissance approfondie du petit monde des musées, des entrailles du Grand Louvre et des Arts, son intrigue finit par paraître un tantinet rocambolesque ou joli capharnaüm. J'hésite.

Pourtant pour ne pas être totalement négative, A. Goetz a tout de même réussi à me donner l'envie d'aller voir de plus près cette tapisserie aux petits points. C'est déjà ça.

Dédale

Extrait :

Une vraie surprise se trouvait posée au bout de la route, un gâteau de conte pour enfants, dame Tartine à son meilleur. Le château n'en est pas un. il ressemble à un mastaba égyptien, ou mieux à quatre ou cinq mastabas empilés comme des moules à cake : une version en pierres locales, avec du lichen vert aux jointures, de la pyramide à degrés de Saqqarah. Rien de moins. Pénélope s'attendait à tout, pas ça… L'Égypte rongée de lierre et de vigne vierge. La Nubie nettoyée au Gulf Stream. Une pyramide qu'on aurait dotée d'une entrée monumentale à colonnes de marbre de style élisabéthain et complétée, à son sommet, par des cheminées Renaissance. Un caprice architectural composite, fou, très réussi et un peu à l'abandon. Pénélope cache mal qu'elle est impressionnée. "- Vous ne saviez pas que nous possédions ces joyaux d'architecture dans l'archipel. Heureusement que mon arrière-grand-père, l'égyptologue, a eu l'idée d'ajouter des fenêtre à notre pyramide familiale. Sinon, ce n'aurait été qu'un tombeau. On s'y est éclairés à l'huile de paraffine jusqu'en 1953, nous avons beaucoup hésité avant d'accepter l'électricité. C'est malgré tout assez pratique, quand le ciel est bas comme aujourd'hui, dans notre sépulcre… Une maison pour nous, qui sommes morts depuis mille ans : ce n'est pas une raison de se morfondre. Ce palais de conte de fées possède des douches et des baignoires, l'eau courante chaude et froide, le téléphone, la télévision un peu floue car ne me suis jamais résolu à l'antenne.
- Elle déparerait tout.
- Mon bisaïeul a voulu une maison joyeuse, et je vous avoue que j'y ai été très heureux, même maintenant que j'y vis seul. - Et des fenêtres à meneaux de style troubadour au beau milieu de ces murailles de pierre colossales, on aurait plutôt attendu des ouvertures "retour d'Égypte", avec des sphinx griffus et des serpents. Je n'ai jamais vu ça nulle part."

Intrigue à l'anglaise
Intrigue à l'anglaise d'Adrien Goetz - Le Livre de poche - 307 pages