Tout commence avec un régime. Un père de famille israélien constate qu'il est un peu en sur-poids, et décide de maigrir. Il essaie toutes les méthodes possibles ou imaginables (à base de chou, de carottes, et même de pop-corn). Mais celui qui semble fonctionner est un régime à base d'olives. Mais lorsqu'un noyau manque de l'étouffer, sa vie bascule.
Car s'il parvient à faire sortir le noyau de l'œsophage, celui-ci est resté coincé près de l'oreille. Et le noyau va germer. D'abord ce sont de petites feuilles, puis des branches d'olivier qui sortent par son oreille. Et impossible de l'arracher ou de le sectionner, car du sang coule alors des branches, et fait souffrir le martyr au malade. Tout laisse à penser que l'arbre a pris possession du corps de l'homme et qu'ils seront obligés de vivre ensemble. Et quand, par malheur, notre homme fait une sieste la tête contre le sol, les racines de l'arbre s'enfoncent dans la terre israélienne. Il est alors contraint de vivre là, avec cet arbre.
Tout cela est raconté de manière très légère, très drôle. Le narrateur est un des enfants du couple, qui présente cette histoire de manière rétrospective. Ceci permet à Benny Barbash de faire de nombreux effets. Mais derrière un premier abord burlesque et fantastique, l'auteur n'oublie pas la description de la famille israélienne, conservatrice, anti-palestienne et qui se sent totalement légitime dans le pays.
La grand-mère, qui tient plus à la théière qui est dans la famille depuis plusieurs générations qu'à comprendre pourquoi son fils a un olivier dans l'oreille, est la plus conservatrice. Mais en devant faire appel à un horticulteur palestinien, ce qui nécessite un trajet jusqu'en Palestine, toute la famille doit affronter ses préjugés, les clichés qu'elle véhicule sur les palestiniens, voisins vus comme des barbares.
Benny Barbash signe finalement un très joli roman sur la question de la présence de l'autre, de l'étranger, et de son acceptation : comment faire pour vivre avec ce qu'on ne connaît pas, et qui devient, malgré vous, une part intime de l'être humain ? En choisissant l'olivier, arbre dont les rameaux symbolisent la paix, l'auteur dépasse largement le cadre de la fiction pour ancrer son ouvrage dans la réalité de son pays, Israël, constamment en guerre avec ses voisins depuis sa création.
Extrait :
Lorsqu'elle eut fini de s'étirer, elle se tourna vers Papa, qui avait bien mérité un bisou matinal en guise de bonjour. Penchée sur lui, les yeux mi-clos, elle sentit brusquement quelque chose lui picoter la narine et se mit à éternuer, parce qu'elle est allergique en période floraison. Après avoir essuyé ses yeux larmoyants, elle tourna la tête pour voir ce qui l'avait piquée. Et ce qu'elle vit était si étrange, si incroyable, qu'elle referma les yeux, les rouvrit et les frotta pour s'assurer qu'elle ne rêvait pas, comme elle l'expliqua par la suite à son amie Tamar. Mais la chose continuait à sortir de l'oreille de Papa, qui continuait à dormir comme un bébé. Pour plus de sûreté, Maman chaussa ses lunettes de vue et se rapprocha encore un peu de Papa.
Elle vit alors clairement qu'il s'agissait d'un minuscule olivier, muni de toutes petites feuilles et de très fines branches, plus fines encore que les mains de Noga.
Et si l'olivier n'était pas sorti de l'oreille de son mari, elle l'aurait certainement trouvé très mignon.
Little Big Bang de Benny Barbash - Éditions Zulma - 176 pages
Traduit de l'hébreu par Dominique Rotermund
Commentaires
dimanche 20 février 2011 à 09h19
C'est vendu ! Je ne sais pas encore quand je le lirai, mais je le lirai, c'est sûr.
dimanche 20 février 2011 à 15h14
Si tu veux, je peux te l'envoyer
vendredi 25 février 2011 à 09h10
Je ne connaissais pas, je l'ai lu dans le cadre de chroniques, et j'ai adoré le style de cet auteur ! C'est enlevé, drôle, et en même temps on réfléchit à une situation sérieuse !
Une réussite ! :D
samedi 26 février 2011 à 15h45
Leiloona : comme toi, j'ai lu ce livre par hasard, et j'ai également apprécié cette lecture. Ta comparaison avec les contes voltairiens est très juste !
jeudi 12 septembre 2013 à 10h10
Je l'ai pris par hasard, car de jolies pépites chez Zulma
Un roman/essai/fable, très yiddish et jubilatoire
Un bon éclairage de la société israëlienne
A faire lire..
vendredi 13 septembre 2013 à 09h30
Martine, je suis ravi de voir qu'il t'a plu. Ce mélange entre conte absurde et réflexion politique est très réussi. A noter qu'il vient de paraître en poche (mais les livres de chez Zulma sont tellement beaux qu'ils seraient dommage de ne pas se procurer le grand format !)