Pendant la semaine de séparation du mari et de la femme, on découvre alternativement les vies de Gilles et d'Alix par le biais de ce qu'ils racontent à leur journal. Pour Gilles, écrivain,le journal est une habitude, et il collectionne les différents millésimes dans les étagères de son bureau. Pour Alix, c'est presque une nécessité, et il lui permet de faire le point sur sa vie amoureuse, tourmentée.

Gilles passe les fêtes seul, et il devrait être en permanence derrière son bureau pour rédiger le manuscrit qu'il s'est promis d'écrire. Mais ses pensées vagabondent, son esprit descend dans la rue au contact des touristes qui attendent désespérément devant les toilettes publics, ou vont vers la fleuriste qu'il croise régulièrement au marché. Mais tout ceci, mêlé à ses innombrables considérations diverses sur la musique et Mozart, ne fait guère avancer son ouvrage.

Alix passe de son côté les vacances dont elle rêvait avec son amant. Elle a trouvé en Nino l'homme qui lui fallait pour vivre d'intenses moment de plaisir sexuel à deux, car avec Gilles, c'est loin d'être le cas. Comme un enfant, elle ment à son mari et monte avec Nino divers stratagèmes pour qu'il ne se rende pas compte de la supercherie. Alix est une femme qui semble revivre, prête à aborder l'imprévu sans crainte au bras de celui en qui elle a confiance.

Si l'histoire est banale, l'apport de Frédéric Teillard est de mêler habilement le point de vue des deux protagonistes. Si Gilles peut à la longue agacer avec sa difficulté à prendre des décisions, à entrer dans le vif du sujet et de ses écrits, le plaisir d'Alix devant sa nouvelle vie est très agréable à découvrir. Elle est dans le concret, prend plaisir aux moindres gestes qu'elle fait avec Nino ou à ses côtés. C'est le contrepoint de ces deux personnages, de ces deux caractères si différents qu'on se demande comment ils ont fait pour vivre si longtemps ensemble, qui est le point fort de ce récit. Le tout se clôt par une pirouette assez maligne pour donner envie de relire l'ensemble et interpréter les gestes de l'un et de l'autre d'une toute autre manière.

Yohan

Extrait :

Je n'ai pas entendu Nino se lever, ni approcher. Il m'a prise par la main et m'a ramenée dans le lit.
Non, tu n'es pas morte déjà. J'avais parlé à voix haute sans m'en rendre compte ? Oui, c'est cela qui l'avait réveillé. Il m'a caressé le visage, mon visage qui semblait tenir tout entier dans sa grande main, il a répété que je n'étais pas morte, laissé un silence puis prononcé ces mots, Gilles a été l'homme de ta vie, je suis ton homme de vie. J'ai pleuré. Il a léché mes larmes. Nous nous sommes endormis.

L'unique objet de mon désir
L'unique objet de mon désir de Frédéric Teillard - Éditions Galaade - 224 pages