Maxime, cambrioleur de haut vol spécialisé dans les antiquités se retrouve malgré lui mêlé à une sombre histoire qui trouve ses racines dans l’alchimie et son éternel serpent de mer, la pierre philosophale. Mélange savamment dosé d’Arsène Lupin, de James Bond et de truand à la Audiard, il compose un héros simple, attachant et facile à apprécier.
D’autant plus qu’il est accompagné d’une adorable pestouille, sa compagne, Delphine. Ancien flic, elle pose un personnage féminin intéressant parce que loin de l’archétype de l’habituel « faire valoir féminin du héros ». Elle sait quoi faire quand ça tourne au vinaigre, elle possède un caractère bien trempé et ne s’en laisse pas compter.
Cet improbable duo va devoir penser et agir vite pour échapper à une collection de gens mal intentionné qui courent tous derrière un grand secret qui remonte à Jacques cœur, la Route d’émeraude.

Parmi les adversaires il en est un que l’on suit tout particulièrement, au point de s’attacher à lui, comme un héros secondaire. Bogdan, le petit tueur, dont on suit la trajectoire et l’ascension au sein de l’ordre d’assassins auquel il appartient, jusqu'à son ultime rencontre avec Maxime et ses acolytes. Bien que son irruption perturbe, au premier abord, on s’intéresse rapidement à lui, surtout parce qu’il est humain, terriblement, parfois plus que ne l’est Maxime. Il souffre et tente de survivre dans un monde cruel, tandis que Maxime saute et virevolte, esquive ses adversaires jusqu'à faire douter qu’il possède la moindre faiblesse.
Le « grand méchant » nommé Arzan reste un « grand méchant », sournois et cynique, mais il passe quasi inaperçus comparativement à son homme de main.

C’est, d’ailleurs, là, un des intérêts de ce livre. L’esprit retord que je suis a fini par trouver plus d’intérêt dans les personnages secondaires que dans le héros et sa compagne. Tous deux font ce qu’on attend d’eux, ils se sortent de toutes les situations avec plus ou moins de brio. Tandis que les personnages secondaires, eux, vivent en sourdine tout au long du bouquin, que ce soit Bogdan cité plus haut ou Roland, l’oncle légionnaire de Maxime (je dis légionnaire au présent, car ce personnage vérifie une fois encore que, retraite ou pas, on ne quitte jamais vraiment la légion). Ce faisant, ils ne cessent d’attirer l’attention et c’est pour eux que j’ai frémis, plus que pour Maxime et Delphine, dont on se doute dès le départ, qu’ils vont s’en sortir.

La Route d’émeraude est écrite dans un style clair, efficace et propre. J’ai particulièrement apprécié la richesse du vocabulaire employé. Preuve, si cela était nécessaire, que littérature populaire n’implique pas forcement pauvreté du langage et facilités grammaticales. Je ne parle même pas, ici, du chapitre final qui avoisine le « cliffhanger ».

Certes, les esprits chagrins y pointeront une intrigue « dans l’air du temps » et quelques clichés, mais tout cela est bien traité, avec honnêteté et générosité. En clair, c’est un bon livre d’été, qui n’a d’autre prétention que de nous distraire et y réussi fort bien. Alors, pourquoi bouder son plaisir ?

Hugues

Extrait :

Occupés à se disputer le décompte des points, les quatre petit vieux n’avaient pas daigné lever le nez lorsqu’ils étaient entrés.
Ce n’était plus le cas, maintenant. Une bourrasque de phéromones les avait frappés, à leur faire oublier leurs cartes. Au diable la belote ! Ils étaient bien trop affairés à détailler avec avidité la nouvelle arrivante qui venait de pousser la porte du bistrot.
Une concupiscence surprenante au regard des années qu’ils affichaient. Un déshabillage en règle, même, songea Delphine en considérant les expressions rêveuses, ou ce qu’elle pouvait en discerner, sous le dense réseau de ravines qui maillaient leurs visages fripés.
Elle dut admettre, cependant, qu’elle pouvait en partie les comprendre. Si elle n’avait jamais fait preuve d’un intérêt autre que social envers une autre femme, elle n’en avait jamais rencontré non plus qui irradiait comme celle là.

La route d'émeraude
La Route d'émeraude de PJ Lambert - Éditions First - 362 pages