L'Hégémonie prépare son départ. Tous les deux siècles, Tiamat passe à proximité des étoiles jumelles qui lui servent de soleil. Ce passage créée des interférences avec le trou noir à proximité, dernier pont interstellaire vers les colonies de l'Hégémonies et la "civilisation". Car Tiamat est une planète extrêmement primitive, maintenue en quarantaine technologique. Mais elle est si importante car elle possède une richesse inconnue ailleurs : les ondins. D'étranges animaux aquatiques et inoffensifs dont le sang bleu à la particularité de donner l'immortalité à qui en consomme régulièrement.
Le temps du changement approche, Hiver touche à sa fin et Eté se prépare. La porte sera bientôt inaccessible et toutes les manœuvres politiques se précipitent. Chacun cherche bien entendu à tirer son épingle du jeu.
Loin des tourments et de la fièvre que l'on ressent dans la ville d'Escarboucle, Moon et Sparks vivent innocemment leur amour dans leur village de pêcheurs. Las, Moon est appelée à devenir Sibylle et à suivre un destin bien moqueur. De rage, Sparks part pour Escarboucle où il va se consoler dans les bras de la Reine d'Hiver, Arienrhod. Arienrhod qui possède les traits de Moon, à croire qu'elles sont jumelles... ou clones.
Joan D. Vinge est une auteur américaine très prolifique dans l'écriture de nouvelles et maintes fois nominée. Elle partage son œuvre entre des romans de SF marquée par ses propres études d'anthropologue et un certain nombre de novellisation dont la plus connue reste Le Retour du Jedi.
Le Cycle de Tiamat entre dans le cadre de cette SF très personnelle dans laquelle elle bâtit un univers complet aux ramifications politiques et ethnologiques complexes pour le plus grand plaisir du lecteur. Mêlant habilement aventure, découvertes, complots en tous genre, romance et technologie, elle donne une profondeur incroyable à cet univers tout en gardant un cadre simple et relativement fermé, puisque la quasi totalité de l'aventure de La Reine des Neiges se passe sur Tiamat (hormis un épisode sur la planète Karemough) et que l'aventure relatée dans Finismonde se déroule sur Numéro Quatre.
Pourtant, malgré cette apparente simplicité, l'histoire est bien plus complexe qu'on ne s'y attend au premier abord. Il y a en premier lieu la nature particulière des ondins, qui n'est révélé que tardivement. Le rôle des Devins et des Sibylles s'explique progressivement et c'est là que l'on pénètre toute la complexité de l'univers de Vinge. Il est aisé, alors, de faire un parallèle avec le Cycle d'Omal de Laurent Genefort, dont la structure mystérieuse n'a rien à lui envier.
De plus, il faut prendre conscience du jeu de l'écriture de l'auteur qui manie les sauts spatio-temporels comme personne. Il est aisé de s'en rendre compte lorsque Moon se retrouve sur Karemough. Elle ne s'est absentée que trois mois au total, mais à cause de la relativité due au passage dans le vortex du trou noir et à l'éloignement de Karemough (située dans un autre système solaire), cinq ans se sont écoulés sur Tiamat. A cela s'ajoute le fait que le Cycle de Tiamat est un cycle "choral". C'est à dire que les événement de Finismonde sont mentionnés dans le second volume du cycle, la Reine d'Eté, où ils prennent naturellement leur place. Ce qui permet de ne pas gêner le déroulement de l'action tiamataine et l'enchaînement logique des événements tandis que le lecteur sait précisément de quoi il retourne. C'est un procédé peu employé car très précis et ardu à mettre en place. Mais le résultat en est une grande cohérence dans les récits et une attention renforcée de la part du lecteur.
C'est un cycle qui se lit très agréablement grâce à une écriture fluide et des descriptions précises des environnements. Il peut être un peu dur de "rentrer dedans" selon qu'on est un lecteur averti de SF ou non, mais une fois que l'univers est en place, il n'y a plus qu'à se laisser porter et à profiter du voyage, car on en prend plein les yeux.
(Voir aussi la chronique du tome 2)
Extrait :
Arienrhod tourna le dos aux étoiles et retourna silencieusement sur la matière synthétique sensuelle du tapis pastel, vers le miroir. Elle contempla son reflet avec le même masque de porcelaine inexpressif qu'elle utilisait pour recevoir des représentants de commerce d'extramonde ou des délégations de la noblesse. Elle examina les torsades complexes de ses cheveux d'un blanc de lait, sous le diadème aux étoiles de neige, la perfection de sa peau translucide, elle passa une main sur sa joue, sur sa gorge couverte de bijoux, sur la soie scintillante de sa robe, douce comme une caresse, en sentant la jeunesse de son corps, aussi admirable aujourd'hui qu'il y a cent cinquante ans, au jour de son couronnement. Mais était-ce vrai ? Les sourcils légèrement froncés, elle se regarda de plus près. Oui... De la satisfaction, dans les yeux de couleur de brume et d'agate humide.
Il y avait une autre raison pour laquelle les extramondiens venaient à Tiamat en portant des cadeaux. Elle détenait la clef pour vieillir en restant jeune. Les mers de ce monde étaient une fontaine de Jouvence, à laquelle les riches et les plus puissants buvaient en payant et c'était elle seule qui en contrôlait la source... le massacre des ondins. C'était son jugement calculé qui décidait quel négociant ou personnage officiel d'extramonde servirait le mieux les intérêts d'Hiver, en échange de cet agrément... C'était son bon plaisir, pas si capricieux, qui accordait à ses favoris les droits d'exploitation de la mer, ou le droit à une précieuse fiole de liquide argenté. On disait que l'importance de la faveur dont jouissait un aristocrate pouvait s'estimer à sa jeunesse apparente.
Le secret des âmes soeurs (Myrihandes - tome 1) de Guilhem Meric - Éditions Au Diable Vauvert - 543 pages
Commentaires
mardi 29 novembre 2011 à 08h11
M'est avis que ce cycle est pour moi. Je ne te dis pas de suite merci Coeur. Attendons la fin