Quelques jours plus tard, dans une proche banlieue de la capitale, Julius Cain, professeur émérite de lettres classiques à la Sorbonne, ne se remet pas du départ précipité d’Anja, musicienne, la jeune femme polonaise qui partageait sa vie et l’ a quitté brutalement.
Mort d’inquiétude, il se décide à aller trouver les flics pour lancer un avis de recherche. Il croise alors la route de l’inspecteur Blaise, brillant esprit, admirateur inconditionnel de Tchekhov, qui végète dans les bureaux du Quai des Orfèvres car sa passion de la lecture est telle qu’il préfère lire pendant ses heures de travail plutôt que de courir après les criminels.
Commence alors pour Julius Cain un retour sur lui-même ; sa vie, son enfance, sa relation trop fusionnelle avec sa mère, inexistante avec son père perdu de vue depuis longtemps, son amour exclusif pour Anja.
Pour Blaise et son acolyte Abrial débute une enquête sur cet étrange Julius afin d’élucider la disparition d’Anja qui semble soudain bien mystérieuse.
Yann Queffélec, fils de l’écrivain Henri Queffélec, frère de la pianiste Anne Queffélec et époux de Brigitte Engerer grande concertiste, déploie ici tout son talent.
Cet écrivain, que je découvre avec ce texte, porté aux nues pour son prix Goncourt Noces Barbares assassiné ensuite par les critiques, m’a prise dans les mailles de son écriture. Sa narration est forte subtile et vous ne lâcherez pas ce roman avant l’épilogue et son dénouement. Peut on dire qu’il s’agisse d’une enquête policière, oui/ mais, d’un thriller psychologique oui mais surtout du portrait d’écorchés vifs, hommes, femmes, jeunes ou non, abîmés par la vie, traînant leur enfance douloureuse comme une blessure béante qui ne se ferme pas, leur vie d’adulte avec ses drames qui leur collent à la peau.
Si vous ne connaissez pas l’écriture de Yann Queffélec, laissez vous tenter par Le plus Heureux des hommes vous ne le regretterez pas.
Sylvaine
Extrait :
Elle fouillait, s’impatientait, peignait d’une main rageuse ses boucles emmêlées, découragée dans cette jungle d’étiquettes vaniteuses et méchantes, butinant d’un empilement à l’autre, arrachant les flacons des boîtes, tremblant si fort qu’ils lui tombaient des mains, berçant une mélopée geignarde entre ses lèvres –Ö de minuit, O sauvage, Ô belle, Ô d’harmonie, Ô d’ambre, de rose, de vaisselle, de boudin non non, ma vieille tu n’y es pas, ô de Lancôôôôme…ô eh, où es-tu ?...Je suis là sous tes yeux, caché dans le foutoir alphabétique des rayons, bien en vue sur un podium de carton plaqué or…Ô comme j’ai soif, qu’est-ce que je ne donnerais pas pour boire un coup , moi !
Le plus heureux des hommes de Yann Queffélec - Éditions Le Livre de Poche - 310 pages
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