After est un tout petit ouvrage découvert par hasard sur le stand des Éditions Le mot fou. Ce texte est d'une rare intensité. Les huit vont raconter leurs tripes, leurs pires douleurs.

Une écriture très particulière, toute en évocation, en impressions sensorielles. Les liens entre la pensée et les réactions du corps au moment de la douleur, celle aussi que l'on vit par le cerveau - la perte d'une femme plus qu'aimée pour Loris, celle d'une mère pour Tristan - ou bien même l'absence de douleur ressentie ou par le corps suite à un accident de vélo et un genou blessé.

Cet after aura pour tous les narrateurs des conséquences. Pour tous, il y aura un avant et un après cette douleur, ces aveux, ces dépouillements immenses des participants car s'il est déjà difficile de s'avouer certaines choses : peurs, lâchetés, incapacités, les manques absolus…, les dire, les avouer à d'autres peut être encore plus insurmontables. Personne ne les verra plus comme avant. Vous non plus d'ailleurs. Évidemment le lecteur non plus n'en ressort pas indemne.

C'est vraiment fort, un peu dérangeant parce que l'on ne peut s'empêcher de réfléchir à ce qui a été ou sera un jour à l'avenir la pire douleur de sa vie. Une douleur physique, morale, amoureuse ? Comment la dirons-nous, cette douleur là ? Comment la vivrons-nous ?

After, un concentré intense, poignant de mots sensibles, profonds et surtout d'amour.
Une excellente découverte.

Dédale

Extrait :

Quelques semaines encore, mois, années jusqu'à un matin et je n'ai rien vu venir et je ne sais pas exactement quand, sais juste qu'un matin puisque la nuit d'avant elle était encore avec moi. Et là oui, là oui le martyr cette fois, enfin, une souffrance inondant comme un amour inonde, à ne plus vous quitter et à vous rendre fou. Là oui, ce matin-là, là oui elle est bien morte ce matin-là.
Et la voilà ma pire douleur. C'est bien ce que tu veux de nous, n'est-ce-pas ? Alors la voilà, sers-toi, servez-vous mes amis. Sauf qu'il en manque un peu, sauf que pas tout à fait encore parce que ma pire douleur je ne peux pas vous la dire, pas encore, parce que ma pire douleur viendra le jour, et un matin peut-être encore, le jour où la douleur dont je vous parle ce soir, la douleur de l'avoir perdue ce matin-là, aura disparu. Et je sais que ce jour viendra, et cette douleur avec lui et la plus horrible entre toutes. A moins à moins… que je ne sois plus là pour connaître ce jour, parce que croyez-moi, et crois-moi, toi ma belle à qui je n'en avais encore rien dit, chaque jour j'hésite à ne plus être là pour ne pas avoir à vivre ce jour-là. Mais même pas le courage de cette lâcheté.

After
After de Franck Villemaud - Le mot fou Éditions - 49 pages