Il nous décrit la déliquescence d'une équipe de flics livrée à elle même. On a presque l'impression que l'intrigue n'est qu'une excuse à cet enterrement annoncé. Tandis que Dacié, le chef jadis charismatique, s’enfouit la tête - tel l'autruche proverbiale - dans la rédaction de ses mémoires de flic atypique, Marquet, son indéfectible acolyte doit faire face à ses vieux démons et à un fantôme surgit d'un lointain passé plus ensoleillé. Les autres membres de l’équipe ne font pas mieux, vous verrez.

Tandis que les morts s'accumulent et se rapprochent des principaux protagonistes, Maxime Gillio nous fait découvrir un Dunkerque qui ferait probablement s’évanouir le syndicat d'initiative. Plein de rues sombres, de façades crasseuses et de quais glauques.

Le style colle impeccablement à cet angle de vue, il colle aux yeux comme la pollution colle aux mur de la ville. Le verbe est précis, riche mais reste efficace, avec d’intéressantes transitions entre le littéraire et le journalier. Tout cela fait qu'on avale ce livre sans soucis. On en vient même à regretter de le finir, on en voudrait plus.
Mieux encore, bien qu’étant dans la continuité des autres « Dacié et Marquet » il reste suffisamment indépendant pour pouvoir se comprendre même si on a pas lu les précédents (ce qui est mon cas).

Un seul bémol, peut être, sera la fin que j'ai sentie un peu « précipitée », comme si M.Gillio s’était, d'un coup, décidé à abréger les souffrances de ses personnages. Pourtant, je ne saurais dire pourquoi, c'est finalement une superbe incitation à lire les précédents, pour profiter du style et peut être, savoir comment les personnages ont pu en arriver là.

Hugues

Extrait :

- Qu'est ce qui se passe, Pierre, c'est quoi cette histoire de flingue à rendre ? Et pourquoi on enquête pas tout de suite sur ce qui s'est passé ? Interroger les riverains et tout ça ?
- Ça me regarde, Charles. Rentrez chez vous !
- Comment ça ? Et moi, ça ne me regarde pas peut être ? Bordel, je suis le chef de cette brigade et c'est une des miennes qu'on vient de buter ! J’estime avoir le droit d'être au courant de tout non ?
Lebégue a une réaction inattendue. Il attrape un pot à crayons et le balance au visage de Dacié. Ce dernier n'a que le temps de se baisser et le pot vient s'écraser contre le mur.
- Vous estimez ? Hurle Lebégue, les veines du cou prête à exploser. Vous estimez ? Mais putain de Dieu ! Vous étiez où ces dernières semaines ? Chef de groupe, vraiment ? Mais bordel de merde ! Un vrai chef aurait constaté depuis longtemps que tout part en couilles ! Un vrai chef aurait remarqué les tensions dans son équipe ! Un vrai chef aurait tenté de savoir ce qui se tramait dans son dos ! Un vrai chef aurait cherché à discuter avec ses poulains au lieu d'aller fanfaronner devant les journalistes ! Un vrai chef aurait accompagné ses hommes au restaurant ce soir ! Un vrai chef aurait pu empêcher Charlotte de mourir !

Dunkerque Baie des Anges
Dunkerque, Baie des Anges de Maxime Gillio - Éditions Sirius - 200 pages