Il n'en faut en tout cas pas plus à Mark Mellery, le destinataire de cet étrange courrier, pour s'affoler et contacter un ancien camarade de fac et aujourd'hui retraité de la police new-yorkaise, le célèbre inspecteur David Gurney.

Au départ sceptique, Dave encourage Mark à contacter le shérif de son comté. Mais l'assassinat de Mark quelques jours plus tard, dans des conditions tout aussi mystérieuses que la missive anonyme, vont l'obliger à s'impliquer dans l'affaire.

Ce roman est un vrai régal pour les méninges et pour tous les amateurs de casse-têtes. John Verdon a imaginé ici un scénario délicieusement diabolique : un courrier qui ressemble à un tour de magie, une scène de crime qui pose plus de questions qu'elle ne donne de réponses, et un criminel qui semble insaisissable. En livrant à ses lecteurs tous les indices nécessaires, John Verdon les met de fait dans la position de l'enquêteur. Nous avons là toutes les pièces du puzzle, à l'instar de Dave. Encore faut-il réussir à les remettre dans l'ordre... Autant vous dire que j'ai passé une bonne partie de roman à échafauder mille et une hypothèses jusqu'à trouver celle qui me paraissait la plus plausible. Inutile également de vous dire combien j'ai été contente de découvrir que j'étais finalement tombée juste. Car trouver la solution avant l'inspecteur, ne gâche rien au plaisir de la lecture.

Il faut dire qu'au-delà de ce jeu de l'esprit, il y a les portraits très intéressants du personnage principal, l'ex-inspecteur Gurney, et de son épouse. Cherchant désespérément sa place depuis qu'il est à la retraite, Gurney ne peut s'empêcher de replonger dès qu'une occasion se présente, au grand désespoir de sa femme. Alors que cette dernière espérait qu'un repos bien mérité leur donnerait l'occasion de se retrouver, elle est obligée d'admettre que son mari ne parviendra jamais à lâcher son ancien métier. Tout au long du récit, et en arrière plan de l'enquête, on voit ainsi le couple s'interroger sur leur avenir commun. C'est aussi l'occasion pour l'auteur de très belles descriptions des paysages du Delaware.

Ce roman publié en France il y a quelques mois, est le premier d'une série mettant en scène l'ex-inspecteur Gurney. Si les épisodes suivants sont aussi bien ficelés que celui-ci, nul doute que je replongerai illico. 658 est un véritable piège dans lequel je me suis laissée enfermer avec délice ! :)

Laurence

Extrait :

Croyez-vous au destin ? Moi oui, parce que je pensais ne jamais vous revoir - et, soudain, vous étiez là. Tout m'est revenu : votre façon de parler, de vous déplacer - et par-dessus tout, votre façon de penser. Si quelqu'un vous demandait de penser à un nombre, je sais lequel ce serait. Vous ne me croyez pas ? Je vais vous le prouver. Pensez à un nombre entre un et mille - le premier qui vous passe par la tête. Retenez-le bien. À présent, voyez comme je connais vos secrets. Ouvrez la petite enveloppe.

Gurney poussa un grognement évasif et lança un regard interrogateur à Mellery, lequel ne l'avait pas quitté des yeux pendant qu'il lisait.
- Tu as une idée de qui t'a envoyé ça ?
- Pas la moindre.
- Des soupçons ?
- Aucun.
- Hmm… As-tu joué le jeu ?
- Le jeu ?
Manifestement Mellery n'avait pas envisagé la chose sous cet angle.
- Tu veux dire, si j'ai pensé à un nombre ? Oui. Dans ces circonstances, il aurait été difficile de faire autrement.
- Tu as donc pensé à un nombre.
- Oui.
- Et ?
Mellery se racla la gorge.
- C'était le 658. [...] Le nombre 658 n'a aucune signification particulière pour moi. Il se trouve que c'est le premier qui m'est venu à l'esprit. Je me suis creusé la cervelle pour essayer de me souvenir de quelque chose à quoi je pourrais le rattacher, d'une raison que j'aurais eue de choisir celui-là, mais sans succès. C'est simplement le premier nombre qui m'est venu à l'esprit, insista-t-il avec une véhémence trahissant la panique.

658
658
de John Verdon - Éditions Grasset  - 448 pages
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Philippe Bonnet et Sandrine Boulongne