Sur le mont Olympe, sur Mars, les dieux s’amusent à faire vivre la guerre de Troie grâce à leur maîtrise de la physique quantique : les déplacements dans le temps et dans l’espace n’ont plus de secret pour eux. Contrairement à l’issue de la guerre de Troie, dont seul Zeus a connaissance…
Pour savoir si le déroulement du combat est conforme aux écrits d’Homère, les dieux de l’Olympe ont fait revenir à la vie, grâce à des fragments d’ADN, des scholiastes de diverses époques, les plus éminents spécialistes du récit homérique.

Sur Terre, à une époque plus avancée que la nôtre, vivent quelques rares humains, qui mènent une vie de pacha, entourés de serviteurs high-tech, allant de fête en fête un peu partout dans le monde, se déplaçant grâce à des anneaux de téléportation, et brillant par un total manque de culture (d’ailleurs plus personne ne sait lire). Le passé est une zone floue, qui ne les intéresse d’ailleurs que peu. La vie est belle, on vit jusqu’à cent ans sans tomber malade (en cas d’accident, les anneaux envoient les « patients » à la firmerie pour les réparer), âge auquel on rejoint pour toujours et pour un éternel bonheur les « posthumains ». Un petit groupe d’humains finit par se poser des questions, et ils vont trouver de bien étranges réponses.

Enfin, dans l’espace, se déplacent, chacun dans leur vaisseau, quelques moravecs. Inquiets de percevoir un trop plein d’énergie quantique émanant de la planète Mars. Les chefs de ces robots humanoïdes, créés par les posthumains, envoient quelques-uns des leurs en mission. Nous suivons donc Mahmut, qui présente certaines ressemblances avec R2D2, et son ami Orphu, qui lui ressemble à une sorte de crabe géant. Entre deux échanges techniques quant à leur mission, nous suivons leurs inénarrables engueulades autour des sonnets shakespeariens et de la Recherche de Proust, chacun défendant son favori.

Le lien entre ces trois univers finit par se faire jour, mais bien avant cela le lecteur est déjà captivé par le roman. Tout est passionnant, pas un chapitre ne semble superflu et l’intérêt du livre va bien au-delà de la simple référence plaisante. On s’interroge sur les avancées technologiques et leurs dérives potentielles, sur le libre-arbitre et la nécessité de la culture… Je regrette simplement mon manque total de connaissance en matière de physique quantique : j’aurais aimé déceler le vrai du faux parmi tous les gadgets technologiques et autres avancées dont bénéficient les divers personnages.

À noter que Dan Simmons a écrit une suite (dont je ne peux vous parler, ne l’ayant pas encore lue) : Olympos.

Du même auteur : Terreur, Drood

Kali

Extrait :

La rage.
Chante, ô Muse, la rage d'Achille, le fils de Pélée, meurtrier, tueur d'hommes, promis à la mort, chante la rage qui aux Achéens coûta tant de braves et jeta en pâture à Hadès tant d'âmes pleines de joie et de vie. Et tant que tu y es, ô Muse, chante la rage des dieux eux-mêmes, si capricieux et si puissants sur leur nouvel Olympe, et la rage des posthumains, bien qu'ils aient été emportés par la mort, et la rage des quelques vrais humains qui subsistent, bien qu'ils soient devenus vains et inutiles. Et pendant que tu chantes, ô Muse, chante aussi la rage de ces êtres pensants, conscients, sérieux mais pas vraiment humains, qui rêvent sous les glaces d'Europe, meurent dans les cendres sulfureuses d'Io et naissent dans les replis glacials de Ganymède.
Oh, et chante-moi, ô Muse, chante ce pauvre Hockenberry, ressuscité contre sa volonté - {...}.
Réflexion faite, ô Muse, ne me chante rien. Je te connais. j'ai été ton esclave et ton serviteur, ô Muse, ô incomparable salope. Et je n'ai aucune confiance en toi, ô Muse. Vraiment aucune.
Si j'accepte, à contrecœur, d'être le chœur antique de ce conte, alors c'est à moi de choisir où il commence. Il commence ici.

Illium
Ilium de Dan Simmons - Éditions Pocket - 900 pages
Traduit de l'anglais par Jean-Daniel Breque