Astaï va ainsi questionner son entourage, notamment ceux qui ont connu sa grand-mère lorsqu'elle était encore en vie. Elle tente de reconstruire cette personnalité atypique à partir des morceaux qu'elle recueille. Elle décide même de faire un voyage en France pour aller sur les traces de son grand-mère, René, le colon. Car on ne sait pas grand chose de lui, hormis la légende prétendant que c'est un poilu de la Grande Guerre, légende qui restera entière.

Rapidement, le roman sort du cadre habituel du roman sur la recherche des origines pour devenir un récit de rencontres. La quête d'Astaï est pour elle l'occasion de faire la connaissance de femmes, souvent blessées et meurtries par la vie, qui vont lui permettre d'avoir un autre regard sur sa grand-mère. Car si les femmes rencontrées n'ont pour la majorité d'entre elles aucun lien avec Beautiful, elles donnent à Astaï une autre vision de la vie. Ces femmes sont des prostituées, des sans domicile, des femmes internées dans un maison d'accueil, des femmes battues.

Si le propos est globalement intéressant, j'ai eu beaucoup de difficulté à entrer dans ce roman et à me prendre d'empathie pour les histoires contées. J'ai été accroché au départ par la vie de Beautiful, qu'on perd rapidement de vue. Par la suite, j'ai eu énormément de mal à me repérer dans la construction du récit. La narratrice change régulièrement (presque à chaque chapitre, voire en cours de chapitre), donnant la parole à ces femmes qu'on découvre, mais qui sont restées pour moi des personnages superficiels.

Peut-être n'étais-je pas dans une période propice à la lecture d'un tel ouvrage, fractionné, où les histoires s'enchaînent sans lien direct ou clairement explicité. Je trouve néanmoins que tout cela manque de liant et je n'ai pas pris beaucoup de plaisir à la lecture de cet ouvrage.

Yohan

Extrait :

Chaque fois que je me pique avec une aiguille, tout me revient. Mon corps qui se vide une nuit d'un liquide sombre et visqueux le long de mes jambes fines d'adolescente. Le torrent dévalant le long de mon matelas. Mon sommeil interrompu et le réveil brutal tellement douloureux. D'une main tremblante, j'ai cherché à tâtons l'interrupteur. Celui qui se trouve tout juste au-dessus de mon lit, mais la peur de mourir avant d'avoir véritablement vécu rend tout imperceptible en cet instant.
Mes dents claquent alors si fort que je me mords la lèvre. La nausée monte pendant que l'inconcevable se met tranquillement en place. Lorsque, enfin, le cri prisonnier de ma gorge jaillit du volcan en éruption, toute la maisonnée est désemparée. On presse ma mère de questions :
- Qu'arrive-t-il donc à votre fille, petite mère ? Elle a l'air de souffrir beaucoup.
- Rien, il ne se passe rien du tout.
Ainsi personne rien su de ma grossesse précoce. J'ai grandi trop vite, et grandir m'a été si douloureux.

La femme du Blanc
La femme du Blanc
de Muriel Diallo - Éditions Vents d'ailleurs - 192 pages