Et si… il s'était passé quelque chose ? S'il existait une autre réalité, où certaines choses seraient arrivées, d'autres non, où le charbon et la vapeur seraient restés les seuls carburants, où le monde aurait pris certains virages particuliers pour écrire une autre histoire.

Le mouvement Steampunk est un mouvement littéraire qui a été créé sur un néologisme pour faire un pied de nez au Cyberpunk de la science-fiction.
Résolument ancré dans un univers de type XIXème siècle, le Steampunk (de steam = vapeur) présente un univers où l'évolution de la mécanique est allée de pair avec l'utilisation de la vapeur. Toute l'ingénierie est donc tournée vers l'utilisation du charbon et de ses dérivés pour alimenter les moyens de transport (trains, dirigeables, bateaux à roues [=steamboat] et autres), mais pas seulement. Il y a dans certains univers une avancée technologique significative avec la création de machines robotisées et même l'utilisation de l'outil informatique (que l'on se réfère pour exemple au film Wild wild West de Barry Sonnenfeld, 1999).

Même si le genre est à l'honneur dans l'industrie du cinéma (la faute aux univers extrêmement riches visuellement et à l'infinité de déclinaisons possibles), les illustrateurs ne sont jamais en reste et prennent plaisir à traiter le thème du Steampunk. Dans cet ouvrage, où le texte et l'image vont de pair, Didier Graffet offre sa propre vision des univers décrits par Xavier Mauméjean.
En fait d'univers, ce que nous propose Xavier Mauméjean est plutôt une relecture d'événements marquants de l'histoire de notre monde, vue à travers le prisme du Steampunk. Il ajoute à cela un soupçon d'uchronie grâce auquel on peut lire le récit de l'arrivée du Titanic à New York. Plus que des histoires, ce sont des tableaux, chacun différent, chacun avec sa voix, sa saveur, qui nous dépeignent un instant T de notre histoire tel que nous ne l'avons jamais appris.
Saviez-vous que les caravelles utilisées par Christophe Colomb pour se rendre aux Amériques volaient ? Ou encore qu'au Ier siècle de notre ère, les insulaires ont remis d'aplomb leur Colosse de Rhodes afin que la gloire de la cité reste intacte ? Et que les dirigeable s'amarraient à son bras levé ?

Bref, c'est un florilège de petits clins d’œil à l'histoire, d'anecdotes intéressantes mais qui ne permettront malheureusement pas de briller en société, ou alors entre initiés... Un ouvrage dans lequel on va piocher en le feuilletant, même si l'ensemble peut se lire d'une traite, les différents récits n'excédant jamais une page.
Le tout magnifiquement illustré par Didier Graffet qui offre là au lecteur tout son talent pour l'immerger dans les textes. Une symbiose parfaite entre l'image et l'écrit, des planches sublimées par le grand format de l'ouvrage.

En fait, c'est LE cadeau de Noël pour les amateurs du genre. A ouvrir, à offrir, à lire et regarder avec le plus grand plaisir !

Cœur de chene

Extrait :

Le 10 avril 1912, le Titanic, fleuron de la compagnie White Star, quitte le port de Southampton pour entamer son voyage inaugural. Au cours de sa cinquième nuit de croisière, un dimanche, le plus grand bateau du monde file à 22.5 nœuds lorsque Frederick Fleet sonne trois coups de cloche depuis son poste de vigie. Il a repéré un énorme obstacle qui se dresse sur la route. La masse de l'iceberg menaçant se détache sur le fond du ciel, plus noir que la nuit étoilée.

Le pilote tente d'inverser les machines pour virer, mais il est trop tard : le Titanic heurte la montagne de glace. Il est violemment ébranlé, "comme si un géant avait donné un coup au bateau" témoignera plus tard lady Cosmo. On entend un gigantesque grincement. Les passagers se penchent au-dessus du bastingage mais n'observent rien d'anormal. Pourtant la coque est déchirée sur une grande partie de son flanc, l'eau glacée s'engouffre dans les cinq compartiments qui ne sont plus étanches. Le capitaine Smith réagit aussitôt. Il téléphone à la chambre des machines, ordonne au chauffeur George Beauchamp d'actionner le système de sécurité. Les panneaux auxiliaires se rabattent et sont soudés sur la plaie du navire par les tuyères de résine à prise rapide. Une réparation de fortune, mais qui a permis d'éviter le pire.
Au soir du 18 avril, le Titanic arrive en rade de New York pour accoster à la pointe de Manhattan. Il croise la statue de la Liberté et est accueilli sur le port par une foule en liesse. "Le monde a craint une tragédie dans les eaux glacées de l'Atlantique nord, mais il est là ! " titre le New York Herald, tandis que L'Illustration représente en pleine page l'immense navire escorté par un essaim de steamboats.

Steampunk
Steampunk, De vapeur et d'acier de Xavier Mauméjean. Illustrations de Didier Graffet - Éditions Le Pré aux Clercs - 120 pages