Un enfant apparaît sur Terre. A Paris.
Sans passé, sans aucune connaissance il va pourtant marquer le monde de son empreinte.
Car il a cette faculté exceptionnelle de pouvoir lire les âmes des vivants, et communiquer avec la matière.
Enfant du monde, il parcourt la planète, multipliant les rencontres, afin d'en savoir le plus possible sur les hommes et dans l'espoir de faire taire définitivement les armes. Il a négocié avec la matière une trêve de sept jours. Il compte bien les mettre à profit.
Sept jours pour découvrir le monde et comprendre qui il est.
Sept jours pour donner à l'humanité un nouvel espoir et peut-être lui montrer qu'il existe un autre chemin.
Sept jours, à compter du jour où la guerre s'arrêta.
Pierre Bordage est connu et reconnu comme l'un des plus grands romanciers français actuels. A son actif, plusieurs dizaines de romans et quelques prix prestigieux comme le prix Bob Morane, le Grand Prix de l'Imaginaire ou le prix Julia Verlanger.
Ce nouveau roman, plus intimiste que ses précédents, est plutôt à rapprocher du conte philosophique. On retrouve tous les ingrédients chers à l'auteur : la quête initiatique, les notions d'amour sans condition (l'«agapé» des croyants), d'intolérance religieuse et de croyances diverses (on croise tour à tour des sceptiques, un maître de l'islam, un maître hindouiste, un curé, un psychologue et bien d'autres), d'avenir de l'humanité, d'écologie et surtout, la paix sur Terre. Si la volonté première est de faire un roman de littérature générale, l'auteur arrive malgré tout à mâtiner son récit d'éléments fantastiques sans que ça gêne la lecture ou la cohérence de l'ensemble. Un style qui fait un peu penser à Pierre Rabhi, avec des préoccupations et des thématiques pas si lointaines que ça.
Toute l'histoire est vue par les yeux de l'enfant. Son niveau de connaissance technique et son vocabulaire étant limités par son amnésie, le récit prend une dimension très naïve. Peut-être un peu trop parfois ?
Mais cette naïveté ne fait que mettre en avant le propos de l'auteur sur les relations entre les êtres. Ce que l'enfant ne comprend pas, le lecteur, lui, le comprend très bien et se retrouve impliqué bien malgré lui dans sa lecture, tenant le premier rôle dans cette quête pour ouvrir les yeux de l'humanité sur son propre destin.
Si le style reste simple, il n'est jamais simpliste. L'histoire avance, multipliant les lieux et les rencontres. Car c'est bien là l'intention première de l'enfant : rencontrer des gens pour trouver quelqu'un qui lui ouvrira la voie vers sa propre âme.
C'est donc un récit de rencontres, durant lesquelles l'enfant en apprend sur notre monde. Le parallèle avec Les Lettres Persanes de Montesquieu paraît judicieux. Le procédé littéraire est le même.
Du point de vue philosophique / métaphysique, impossible de ne pas faire le lien avec le récit du Petit Prince, et plus récemment celui de l'Alchimiste de Paulo Coelho. La dimension religieuse m'a également fait penser à Rencontre avec le Christ, de Roberto Badenas. Un petit ouvrage fort simple qui sert le même propos : des rencontres avec les hommes pour leur ouvrir les yeux, la volonté de leur faire ressentir un amour immense, inconditionnel, les uns pour les autres et les voir vivre en paix.
Si Pierre Bordage aborde différents thèmes dans ce court roman, il ne se disperse pas et la quête de l'enfant trouve un terme. Malgré tout le lecteur reste un peu sur sa faim. C'est sans doute le seul bémol de l'ouvrage. Un petit goût d'inachevé en tournant la dernière page.
Malgré ce léger détail, l'histoire reste agréable, comme un conte, précisément.
Une histoire que l'on a envie de partager, parce que c'est beau. C'est bien écrit, et ça parle au cœur directement. Le meilleur moyen de faire connaître l'auteur à d'autres lecteurs.
Extrait :
La tâche ne fut pas aussi aisée que je l'avais supposé.
J'établis le silence en mon âme, l'étendis aux confins de ce monde, puis neutralisai, avec leur aimable autorisation, toutes les machines de guerre, roulantes, volantes, flottantes, sophistiquées, rustiques, petits et grands flingues, feu, fer, gaz, poison, plomb, atomes, billes, balles, lames, tout ce qui, d'une manière ou d'une autre, déchirait les chairs, éventrait la Terre, détruisait les cités, incendiait les végétaux, massacrait les animaux. Les armes se révélaient si nombreuses et diverses que je ne pus me retenir d'admirer l'ingéniosité des êtres humains.
La matière m'accorda finalement une trêve de sept jours.
Le jour où la guerre s'arrêta de PIerre Bordage - Editions Au diable Vauvert - 288 pages
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